Henri Vaassen ou le défenseur des connaissances linguistiques

Celui qui pense que l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai n’est qu’une entité abstraite devrait s’entretenir avec Henri Vaassen. Ce Néerlandais natif, qui a étudié les langues romanes en Belgique, vit et travaille depuis vingt ans dans le nord de la France, où il promeut l’enseignement du néerlandais. 

Notre réunion n’aurait pas pu être plus eurométropolitaine. Nous parlons en néerlandais autour d’un café liégeois sur la terrasse de la Pâtisserie Méert à Lille, un détail qui n’est pas sans importance pour cet homme originaire du Limbourg néerlandais. Après avoir étudié le français et l’espagnol à la KU Leuven, Henri Vaassen passe la frontière du Limbourg belge, où il travaillera pour l’université UHasselt, Campus Diepenbeek. À l’époque, Diepenbeek est en collaboration avec l’ULCO, l’Université du Littoral Côte d’Opale, qui cherche des enseignants en néerlandais. Et voilà : Henri Vaassen devient officiellement un habitant de l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai. Il déménage alors à Lille et commence à enseigner le néerlandais à l’ULCO de Dunkerque. 

Vingt ans plus tard, il quitte la métropole de Lille pour s’installer dans un lieu paisible non loin de la mer dans la région de Dunkerque. Toutefois, sa passion pour les langues et en particulier pour le néerlandais ne l’a jamais quitté, bien au contraire. Si vous interrogez les habitants du nord de la France sur les initiatives en matière de langue et de culture néerlandaises, vous entendrez très vite parler d’Henri Vaassen. Son nom apparaît aussi régulièrement sur la toile : des enfants en bas âge français qui apprennent le néerlandais ? Une coopération transfrontalière entre les écoles flamandes et celles du nord de la France ? Une seule adresse : Henri Vaassen. 

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Pas étonnant qu’il ait été élu président de la Maison du néerlandais à Bailleul ou Belle en flamand-français. Il précise tout de suite : « Notre mission n’est pas de promouvoir le flamand-français, un dialecte qui est encore parlé sporadiquement dans la région. La Maison du néerlandais est une organisation indépendante engagée dans l’enseignement et la promotion de la langue néerlandaise. Il y a une vingtaine d’années, Bailleul avait déjà compris que dans cette région frontalière, il était important de maîtriser les langues officielles des deux côtés de la frontière. Grâce à l’administration communale, la Maison du néerlandais y est arrivée et Bailleul est aujourd’hui encore notre plus grande source de financement. »

Malgré la corrélation manifeste entre la pénurie sur le marché de l’emploi d’un côté et le taux de chômage plus élevé de l’autre, travailler au-delà de la frontière n’est actuellement pas évident. La langue est un obstacle considérable. Paradoxalement, l’enseignement du néerlandais en France est de moins en moins populaire, tout comme du côté flamand, où le français n’est en réalité plus la deuxième langue depuis longtemps. Une constatation douloureuse, surtout dans notre Eurométropole. Raison de plus pour Henri Vaassen de continuer à se battre pour promouvoir le néerlandais.

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« La Maison du néerlandais a désormais des points d’ancrage à Lille, Dunkerque (Rosendaël) et Halluin. Chaque année, environ 300 adultes viennent suivre un programme néerlandais intensif chez nous. Nous avons une offre fixe de cours pour particuliers, mais nous travaillons également avec les entreprises. C’est là que nous aimons puiser de nouveaux besoins et de nouvelles opportunités. Ainsi, nous avons désormais une formation très spécifique pour les bateliers. La liaison Seine-Escaut est encore loin d’être réalisée, mais de nombreux bateaux français « font déjà la navette » entre Valenciennes et Anvers ou Rotterdam par exemple. Il est donc d’une importance capitale que le capitaine français d’un bateau puisse également comprendre des instructions et des informations de navigation en néerlandais. »

La Maison du néerlandais accueille également les enfants et les jeunes à bras ouvert. « Plus tôt ils sont en contact avec le néerlandais, mieux c’est. Nous travaillons en collaboration avec des administrations communales ainsi que des écoles primaires et secondaires afin d’introduire le néerlandais. Même durant le temps libre, nous cherchons des formules qui pourraient améliorer la visibilité du néerlandais et de la culture flamande et hollandaise. Nous organisons par exemple, avec des partenaires tels que le Comité pour la Flandre française, deux compétitions par an : une dictée et le Concours de la langue néerlandaise. Nous donnons toujours au prix une touche néerlandophone : des publications néerlandophones ou bien une excursion en Flandre ou aux Pays-Bas. » 

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L’attention accordée tant à la Flandre qu’aux Pays-Bas se reflète également dans l’équipe pédagogique de la Maison du néerlandais : « Nous travaillons avec une équipe fixe de huit professeurs de néerlandais, la moitié étant de Flandre et l’autre moitié des Pays-Bas. Pour les cours sur mesure, les clients peuvent indiquer quelle « variante » de la langue ils souhaitent apprendre, tandis que notre offre fixe propose un mélange des deux. Au fil des années, cette équipe d’enseignants n’a pas beaucoup changé ; ils continuent de se consacrer à l’enseignement du néerlandais en France avec enthousiasme et dynamisme, même si parfois (pour ne pas dire souvent), ils luttent un peu contre le courant. 

Pourtant, pour ramer à contre-courant, Henri Vaassen n’a pas besoin d’information de navigation, ni en français ni en néerlandais. Il le fait, tout simplement, en sensibilisant à maintes reprises les gens, les organisations et les autorités à l’importance du néerlandais, poussé par une passion pour la langue et la culture qu’il véhicule à la Maison du néerlandais, mais aussi à l’ULCO et grâce aux nombreuses autres initiatives relatives à l’enseignement multilingue qu’il a amorcées dans le nord de la France. 

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Pour ceux qui ne savent pas ce que l’Eurométropole peut signifier dans la pratique, il est temps de tenter un café liégeois sur la terrasse de la Pâtisserie Méert, et surtout, en compagnie de l’Eurométropolitain Henri Vaassen.

Conny Van Gheluwe

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