Faire des rencontres tout en pratiquant son néerlandais ou d’autres langues. C’est le concept du Café polyglotte (Taalcafé). Les participants se retrouvent plusieurs fois par mois au café pour échanger. L’essentiel pour l’initiatrice Kristin Keller, c’est « la convivialité ». Sans obligation, sans contrainte. Simplement des Courtraisiens qui se retrouvent pour papoter dans un cadre sympa. Nous…

Nous sommes un soir d’été à Courtrai autour d’une longue table sur la place herbeuse de la Groeningelaan. Les participants prennent place un à un. Ils s’embrassent, s’échangent des sourires et des salutations chaleureuses. Les habitués sont là, et aussi quelques nouveaux. Cela n’a pas d’importance : chacun est accueilli comme s’il était là depuis des années.

Nous sommes près d’une vingtaine quand le Café polyglotte commence. À moins qu’il n’ait déjà débuté ? Pas de début officiel, ni de fin d’ailleurs… L’ambiance est cordiale, sympathique, informelle. Et la formule fonctionne : quatre ans après son lancement, le Café polyglotte compte une centaine d’habitués et des nouveaux qui se croisent régulièrement, même si tout le monde ne vient pas à chaque fois. « En hiver, nous nous sommes retrouvés un jour au café De Dingen, le groupe était pratiquement au complet et les derniers arrivés pouvaient à peine entrer », explique quelqu’un en riant.
Le groupe ne veut pas donner l’impression d’être un club fermé. « Nous sommes particulièrement attentifs aux nouveaux arrivants », dit un jeune homme de la première heure. « Rien n’est plus déplaisant que d’arriver dans un groupe où on ne se sent pas le bienvenu. Nous accueillons tout le monde à bras ouverts. »

Kristin Keller est rayonnante. Elle se réjouit des allées et venues, écoute avec plaisir les anecdotes de vacances et apprécie l’attention que les participants se prêtent. De temps en temps, elle change de place pour parler avec d’autres. La nuit tombe et on allume les bougies. Ici et là, les plus frileux sortent les plaids. « Je me rappelle qu’après mon cours de néerlandais, je cherchais des gens avec qui parler, j’avais hâte de mieux connaître ma nouvelle ville, Courtrai. C’est ce qui m’a donné envie de créer le Café polyglotte, pour donner aux gens cette opportunité de discuter », explique Kristin, une Américaine qui vit à Courtrai depuis déjà quelques temps.

Kristin a fondé l’asbl OpenDeur pour donner un cadre à ses nombreuses activités, et de nombreux volontaires se sont joints à elle. Citons par exemple le café dansant, l’initiative d’un bénévole, qui l’a proposée au groupe et qui l’a concrétisée. « L’idée de se retrouver pour parler, mais aussi pour danser me plaisait bien », dit-elle en riant. Et ce n’est pas tout. Au fil des années, des amitiés se sont tissées entre les participants, qui sortent le week-end, organisent des visites ou vont se promener ensemble. Nous avons aussi créé le club de lecture Kopje Boek. Chaque mois, un petit groupe de participants discute d’un texte lu à voix haute par l’un d’entre eux.

« J’espère que nous aurons bientôt notre petit coin à nous », déclare Kristin, qui habite en plein centre de Courtrai et qui veut aménager une partie de son logement en lieu de rencontre. « Une international house en quelque sorte, où les gens peuvent venir pour parler et poser des questions. » De nombreux participants se disent intéressés. Lorsque vous arrivez dans une ville sans parler la langue ni connaître personne, vous vous sentez bien seul.

Entre-temps, j’ai engagé la conversation avec Előd, un Hongro-Roumain qui vit à Gullegem. Nous ne tardons pas à découvrir que nous partageons la passion des montagnes et de la photographie. Il me montre sur son téléphone une série impressionnante de clichés, des paysages d’hiver féériques aux macros d’insectes. Il semble partir en exploration tous les week-ends, avide de découvrir le monde qui l’entoure. Cette curiosité a l’air d’être partagée par la plupart des participants. Ce soir, la tablée est composée de personnes de divers horizons : Heule, Wevelgem, Allemagne, Dunkerque, Harelbeke, Colombie, Anvers, États-Unis, Bulgarie, Staden, Roumanie et Roulers. Tous ont rejoint le groupe grâce à des intermédiaires et par des chemins différents, et ils ne l’ont plus jamais quitté. « Nous appartenons tous au même monde et le monde appartient à chacun d’entre nous », chante The Scene. C’est la philosophie du Café polyglotte.
Bart Noels
Foto’s: Lukas Noels
