Le concept d’une Pecha Kucha Night à Tournai est simple, mais efficace. 20 images l’une à la suite de l’autre, 20 secondes par image. La durée de la présentation n’est pas modifiable. Les présentations sont éloquentes, concises et ciblées. Nous étions invités à l’une de ces soirées, organisée par CHOQ, une association qui stimule l’entrepreneuriat,…
Le quai Saint-Brice. Le cœur de Tournai. Nous marchons sur le pont qui enjambe l’Escaut et sommes attirés par les drapeaux de CHOQ. Ce soir, c’est « the place to be » : un vieil immeuble auquel on insuffle une nouvelle vie. La première présentation Pecha Kucha est donnée par les propriétaires actuels : « Les Locos donnent de la voix », un collectif qui veut redonner vie à des lieux laissés à l’abandon. « Le propriétaire est heureux que cet immeuble ne soit plus squatté », disent Gouan Chajia et Nathalie Quievreux. Ici, quai Saint-Brice, ils veulent créer un lieu dédié aux artistes, aux co-workers, etc. Leur ambition : « être un incubateur à idées ».
Or, c’est précisément la mission de CHOQ. Née de la Chambre de commerce, cette organisation mène depuis des années une existence autonome, entre économie, éducation et innovation. « Nous mettons l’accent sur des thèmes socioéconomiques.

Cependant, nous y développons de nombreux projets et formats différents », explique avec enthousiasme le directeur André De Graeve. « Notre plus grand projet est Tilt, dans le cadre duquel nous mettons les élèves du primaire en contact avec l’industrie. Mais nous organisons aussi ces soirées Pecha Kucha. » André De Graeve me donne un verre de « La Rose des vents » et file vers un autre invité. « Cette bière sera évoquée tout à l’heure lors des présentations », me glisse-t-il tout sourire.

Yourt
Le rythme des présentations est élevé. L’attention de la soixantaine de participants est totale. « Roulez jeunesse » est le thème de la soirée : seuls des projets de jeunes sont à l’ordre du jour. C’est notamment le cas de celui d’Anthony Mulligan qui fabrique des Yourts, des tentes mongoles rondes. Il s’est rendu dans le Sud de la France pour apprendre le métier et en construit désormais un peu partout en Wallonie. « Nous devons trouver des solutions à la pénurie de logements », dit-il avec enthousiasme.

Emma Winberg, Berenice Vanneste et Florence Devos, qui ont fondé ensemble La Bistrothèque, sont elles aussi passionnées. Il s’agit d’une série d’ateliers socioculturels itinérants organisés en différents endroits de Tournai, lors desquels les participants déterminent l’ordre du jour. « Les gens qui veulent tester leur passion peuvent s’adresser à nous. Nous souhaitons aussi toucher un public hétéroclite. Cela nous procure une expérience riche : nous avons déjà rencontré tant de gens de cette manière. » Les ateliers vont du dessin au maquillage en passant par la fabrication d’objets.

Passion
Bastien Gadenne et Dylan Delrue font une présentation technique. Ils ont conçu un système modulaire de conteneurs avec lesquels ils bâtissent des constructions résidentielles et autres. Ce ne sont encore que des prototypes, mais l’ambition est là. Un peu plus tard, nous écoutons Stéphane Renard et Arnaud Rasson, qui ont transformé une grange de ferme à Pottes en brasserie. Leur production est en dégustation pendant cette Pecha Kucha Night. « La bière, c’est une passion », disent-ils pendant la présentation de leur projet. Je sirote mon verre et je goûte leur passion. « Tous les ingrédients proviennent de la région frontalière. Notre distribution est exclusivement locale. Et nous n’utilisons pas de grosses machines. »

Pendant la pause, je commence à discuter avec un Tournaisien. « C’est une bonne chose que ces jeunes soient là. C’est ce dont nous avons besoin à Tournai », m’affirme-t-il. Comme d’autres endroits de la région frontalière, Tournai doit également disposer d’un tissu dynamique de PME. « Des gens qui prennent l’initiative et lancent quelque chose qui doit nous aider à aller de l’avant en tant que région. » C’est ce que fait Miss Hibernetica. Elle fabrique des vêtements à partir de matériaux recyclés. « Ce n’est pas facile de faire distribuer mes pièces uniques, dit-elle, mais je persévère. » Tout comme Remy Desobry qui vient de lancer sa société « Getprinted » où il utilise son imprimante 3D pour créer des objets en édition limitée. « Nous faisons ce que nous voulons ; notre seule limite est notre imagination », dit-il.
Rémy Vangenechten souhaite qu’un plus grand nombre de Wallons prennent le vélo. Avec ses ateliers à Ath et Tournai, et ailleurs en Wallonie, il veut rendre la pratique du vélo confortable et attrayante. Kevin Hyde clôture le défilé des orateurs. Avec Pinkroaw, il a mis sur pied un studio audiovisuel. « Nous voulons surtout beaucoup collaborer », dit-il. « Nous pouvons encore mettre en valeur tellement de talents qui ne se trouvent pas forcément dans la ville ou les environs. »

Offrir un forum
C’est exactement ce que propose ce Pecha Kucha : des jeunes talents et des projets de la région. « Qu’en avez-vous pensé ? » me demande André De Graeve à la fin de la soirée. Moi : « J’ai trouvé cela inspirant. Et formidable la manière dont vous offrez un forum ouvert à ces initiatives sans trop de formalités et dont il est possible d’assister à une soirée sans avoir à appartenir à un club. »
Une région a besoin de ce type de lieux, d’espaces et de formats pour échanger, partager. Je savoure une autre bière de la brasserie de Pottes avant de retraverser le pont sur l’Escaut. Bilan personnel de cette Pecha Kucha Night à Tournai : une soirée formidable !
Texte : Bart Noels
Photos : Lukas Noels